Se ré-signer

Le lecteur se demande-t-il de quel signe il s’agit ? S’il se répète, est-ce encore le même ? Passer sans rien faire, ça veut dire que le temps est passif, et quelque chose s’agite en nous pour le passer. S’agite ou s’agit sagement ? Il ne suffit pas que le temps passe, si nous ne passons pas, si nous ne voyons plus le fond de ciel étoilé, les lumières sur la forêt, les reflets sur l’eau, si nous ne voyons plus vivre et danser le monde redevenu joyeux et calme. Comme lorsqu’on fait un beau rêve. Étranges ces rêves nocturnes ressemblant à notre réel peuplé de ceux que l’on aime et connaît, plus ceux qui viennent s’immiscer dans le film. Ce qui donne au film ou au rêve, cette impression de cauchemar ou de bonheur.
Il y a des auteurs vraiment lucides, touchant des points sensibles comme cette imagination que la raison prétentieuse méprise, ce en quoi elle se trompe. Car dans l’imaginaire, il y a du monde. Et du monde réel, en plus du monde fantasmé. Le monde tel qu’il vit et celui qu’on voit, comme une rencontre.
On retrouve cette idée là dans le choc du présent, point de rencontre en deux temps, dans le flux montant et l’ascendant, qui se croisent, ou comme celui des générations.
Certes, nous ne sommes pas venus sur terre pour y rêver, pour dormir, ou s’enivrer. Nous sommes venus ici pour ceux qui nous sont chers, composer la chaîne cruciale vitale dépassant largement le temps de notre existence. Plus que biologique, plus que sociale ou historique, sans rien exclure du tout.
Il s’y dessine tout un passé futur. Un passé sur lequel nous ne reviendrons plus, comme lorsque les jeux sont faits, et qu’il vaut mieux ne pas les perdre. C’est de ça qu’il s’agit lorsque nous parlons de signe plus ou moins.
Des signes, et de l’imaginaire.
Qu’entendons nous du monde des événements, je veux dire intérieurement, sans tenir compte de ce qu’en disent les radios, quels signes en tirons nous ?
Pourquoi désigne-t-on un ennemi ? Imagine la manip : Tous ceux qui pèsent sur les signes. Ce qui fait une pensée, une opinion juste, ou injuste. Avec les conséquences dramatiques que l’on sait, les souffrances du monde que nous ne préférerions pas voir ou imaginer tellement c’est atroce. L’imaginer est plus pénétrant que le voir, on se met à la place de celui qui vit cela, comme si nous le vivions. Ceci dit, nul n’est revenu des chambres à gaz, ou des couloirs de la mort nous décrire leurs impressions et leurs souffrances. Mais on peut imaginer ce qu’elles furent, ou seront.
C’est pour ça que le monde s’inquiète.

Passer son temps

Le temps passe sans rien faire, on se retrouve à en parler, à lire et à boiter sans comprendre ce qui se passe, n’ayant plus comme perspective que la mort qui nous suit.
On la dessine croyant la tenir entre nos mains, elle nous brise les reins. Tout semble si vain. Si douloureux.
Ces amours qu’on nous arrache, ces faux frères, ces assassins de tous nos rêves, qui nous laissent gisant sur la grève, et se servent de nous pour assouvir je ne sais quelle vengeance, et fomenter des guerres contre nos âmes.
N’aurions-nous pas aimé comme il faut, accompli nos devoirs, conjugué nos mots à temps, et pris soin des siens ? Il n’y a plus rien de suffisant pour échapper à nous-mêmes dans cet ultime face à face, où le vide nous attend. Le vide atroce, l’absence, personne à tenir dans ses bras, et cajoler. Sentir son cœur palpiter comme une île et un espoir.
Tu voyais.
Tu as vu les océans, les vagues, le vent, les neiges, le soleil brûlant ta solitude, tu as franchi sans le savoir les limites interdites de ta mémoire défunte. Et tu constates le cynisme affligeant des tueurs qui t’envoient dans ton ciel sans l’ombre d’une pitié.
Est-ce pour cette unique raison qu’avant tout combat contre tes ennemis légitimes, tu dois mieux faire, mieux penser sans compter, sans calculer ta dépense. Là, sans doute, ni redoute, sans reculer tu retrouves ton corps conscient. Et fort.
Le fleuve des mots a cette vocation là, les images, les formes, les sons, les poèmes et les monuments érigés te ressemblent, ce sont comme des habits dans lesquels tu te glisses. Comme les masques des sorciers qui effectuent leur danse rituelle, comme le dragon secret, où la foule s’effraie.
Elle réalise à quelle puissance ils ont affaire.

L’enjeu

Non, l’enjeu n’est pas de tenir sa croix, ses icônes, son croissant ou son sceau de Salomon comme un étendard sanglant et victorieux sur ces morts que nous croirions avoir vaincu. Il s’agit d’autre chose, de plus profond qui peut se révéler. Situation précaire de la terre et de la vie dans ces univers où nous nous sentons radicalement seuls et sans écho, sans autre vie possible. Pensez donc, nous serions enfermés dans une bulle à jamais, sans ouverture vers le ciel et par conséquent avec tout Ce qui l’habite. Nous ne serions rien qu’un minuscule incident, sans voix, succombant dans l’oubli total ?
Les intempéries, la dureté des climats, peu importe la cause, nous rappelle que nous sommes en principe vivant.

Que pourrions-nous savoir ?

Si vous pensez que la totalité ne fonctionne que par la raison ou par la science, nous allons avoir du mal à nous entendre. De même que ceux qui ne jurent que par l’hermétisme, ou les voies impénétrables qui nous surplomberaient.
Si la nature était prévisible, cela serait d’un ennui mortel. Par mer calme, une lame de fond peut surgir inopinément, et emporter l’imprudent. Il se peut qu’il ne se passe rien, probablement. Cependant ça arrive. La nature est invisible et parfois visible. C’est d’ailleurs la raison d’être de l’art, de saisir ces moments rares où la nature fait son apparition. À la façon d’un souffle qui vient ou ne vient pas, sans que nous sachions s’il va venir, et comment il viendra, ou non.
Il est néanmoins probable qu’un pommier donne des pommes, et non pas des poires. Dans ce sens nous pourrions penser la nature conforme à nos prédictions, sans cependant savoir d’avance la saveur exacte ou la quantité que l’arbre nous donnera. Disons qu’il y a de la marge, une certaine probabilité, sans plus, jamais atteinte en entier.
Si nous pouvions savoir à l’avance, la vie serait sans sel. Qu’aurions nous à y faire ? Il suffirait de laisser faire la machine et se laisser emporter par le courant.
Mais le réel n’est pas ainsi dans son ensemble. Il arrive que des éléments inattendus viennent bouleverser nos plans. Et modifient nos trajectoires. Des visions, des intuitions, des pensées surprenantes ou des hasards, des étranges coïncidences perturbant la monotonie des jours. Des angoisses, ou des fantômes, brisant l’uniformité. Tout cela échappant à la raison. Nous pourrions par conséquent la perdre, ou le simple bon sens.
Si la nature se cache ce n’est pas sans raison. Si elle s’expose elle se met en danger. Disant cela par « hasard », jetant cette phrase, j’en ignore la raison. Il n’est pas exclu que l’univers naturel contienne un prédateur affamé.
Rien n’étant innocent, ni gratuit. L’erreur est incluse dans la vérité, de même que l’impur dans le pur.
Et c’est par là que nous pourrions progresser. Non pas en professant un pur pur dénué d’altération. Encore moins un impur pur. Évidemment…
Mais je vous laisse, à vous de voir.

Le fil de la pensée

Dans l’avion pour New-York, partant à l’aventure il y a de cela 50 ans je lisais tel un béotien la sonate à Kreutzer de Tolstoï, et songeais que tout était en germe, déjà exprimé, déjà pensé. Puis aujourd’hui lisant les possédés de Dostoïevski, je retrouve cette même impression, atténuée et moins naïve, des idées et des sentiments exprimés, de ces mêmes quêtes qui hantent les hommes. Je me trouve différent dans ma lecture. Il me semble pouvoir pénétrer plus en profondeur dans les subtilités, la finesse des traits dessinés, les modulations, comme pouvant saisir l’arrière plan, ce qui se trouve entre les lignes, qui n’est pas évident à première vue.
Subtilité de la plume inspirée, produit des âmes délicates, arrivant à rendre ou presque, visible l’invisible. Ce qui n’est peut-être qu’une projection de ma pensée et de mes désirs, ceci n’est jamais à exclure. Non, ce qui est intéressant c’est de lire les âmes. Ici des âmes russes. Comme par hasard.
Alors qu’il est en ce moment question de la Russie, et que ces auteurs ont fait couler beaucoup d’encre à propos de leur culture, de leur sensibilité, de ce qui fait leur originalité. De leurs passions et de leurs crimes.
On se transforme avec le temps, mais demeure un fil. Plus jeune, il me semblait pouvoir appréhender le signe contenu dans les images plus que dans les mots, recouverts de sens qui me restaient cachés, très voilés. Ça, c’est selon les gens. Des jeunes gens peuvent avoir très tôt un regard d’aigle sur ce qu’ils lisent, et n’entendre rien à des peintures, ou des musiques. Ceci dit, celles-ci pompeuses ou savantes peuvent n’être que des glouglous très bêtas, ou des chevauchées de chars, de canons sans trop de nuances.
Il y a tellement d’œuvres. L’important dans une œuvre, c’est ce qu’on ne perçoit pas. Et l’ensemble des œuvres fait son ouvrage de tisser en nous une somme de recoupements, de constantes, d’impressions fugitives et d’entendements de choses secrètes, en affinité avec nous.
On finit par s’entendre, ou se voir dans tout ce chaos orchestré. On finit ou on commence ?
Qu’est-ce qui a évolué sur le fil de la pensée ? Et comment ? Sans doute celui qui œuvre déroule en lui ce fil, fait en sorte de l’exprimer au mieux, ce qui permet à l’autre de mieux se voir, par ce qui lui a été donné à voir, à lire ou à entendre. Ainsi il y a transmission de l’un à l’autre. Nous ne serions plus enfermés dans notre psyché maladive.
Deux parenthèses :
Bizarre tout de même ce qui se passe sur cette terre. Avant, en Nouvelle-Calédonie, il n’y avait pas de prison. Les civilisés conquérants en ont construit.
Qu’est-ce que les Russes auraient commis comme crimes qui serait aux yeux des occidentaux comme absolument impardonnable ?
Quel est le sens de tout cela ? De ces enfermements respectifs, du voyage qui se passe mal, comme des marins qui font naufrage.
Remarque, le marin aime la mer qui lui parle, et cela fait son bonheur.

Nihilisme

Qu’est-ce que ça veut dire ce nihilisme ? une absolue négation de tout ce qui est en l’état, dictant notre condition, sur la base de principes et de lois fausses, de mensonges, d’erreurs et de conditionnements qui rendirent le monde esclave, faire table rase.
On a vu ce que cela donnait. Retomber dans des pièges identiques, des empires et leurs mains de fer, du même ordre que ces royaumes, si ce ne fût pire. Tout cela jalonné de crimes, pour un bien hypothétique qui s’avère sans consistance. Humanité vivant sous la terreur. La même que celle instaurée sous les théocraties, qui brûlèrent les sorcières et les brûlent encore.
Comme si nous ne pouvions vivre sous le règne du doux. Et que nous allions nous y endormir ou nous vautrer dans la fange des plaisirs, perdant toute liberté. C’est un peu ce qui se passe dans ces pays aisés qui pensent que tout leur est dû. Et que le monde est à leur service, dès lors qu’ils mettent genou à terre devant les autorités puissantes du moment, sans voir que le règne est d’une violence inouïe, facteur de misères. Et suscite ces envies de révolutions.

L’athée n’est pas obligatoirement nihiliste.

Il laisse Dieu en suspens, se figurant son absence. Il peut prendre de l’existence cette part de la nature qu’il juge belle et bonne, et se calquer sur elle, sans présumer des plans qui la précèdent. De même ce qui en devient une fois quittée la terre.
Le croyant ou le non croyant sont au même niveau d’ignorance du voyage des morts. Le nihiliste affirmant qu’il n’y a plus rien. En quoi il n’a pas complètement tort, c’est qu’il n’y a plus rien de ce qui était ici. Sauf en nos mémoires. Ce qui n’est pas rien. Ce qui nous fait entrer dans des songes étranges. Et nous touche dans nos profondeurs. Ce qui nous détermine.
Nous ne pouvons faire abstraction des affects vécus et éprouvés, de même des visions que nous avons eu. Tout cela nous traverse, qu’on le prenne ou le rejette. Ce qui nous pousse à agir, à notre insu ou en conscience, selon notre degré d’ouverture et d’amour.

La difficile question du Rien

C’est celle de l’infini, de la totalité, de la présence et de l’être, face à ce qui n’est pas. Avons-nous sérieusement les moyens d’y répondre si nous ne « sommes » pas dans cette totalité ? Si nous ne sommes pas cette totalité en nous-mêmes, que ce soit par le biais d’une humanité, d’une nature et d’un cosmos. Disons essentiellement. Sans réduire à l’insignifiance le moindre de nos gestes et nos pensées.
Plutôt qu’une table rase voyons ce qu’on pose sur la table. De quoi peut-il s’agir ?
Il s’agit, d’agir. Dieu s’agit. Se peut-il qu’Il agisse sans Nous ?Quantité négligeable ? Ce serait une atrocité existentielle si nous procédions de la connaissance, et que nous la perdions.
Que les hommes se mettent en révolte face à ces horreurs mais qu’ils fassent aussi le choix de la merveilleuse vie qui existe, aussi bien ici qu’ailleurs.

Ce qui est troublant

C’est le gouffre amer des amours perdus. Il y eût une déchirure quelque part, incompréhensible, à laquelle nous devons faire face, sans autre recours que de nous-mêmes. Et le soutien inconditionnel de la Nature, hélas mise à mal.

Qui connaît la vraie vie

Il faut l’avoir vécue pour la connaître et l’ayant connue s’en tenir à elle sans défaillir. C’est un frêle esquif dans la tempête poursuivant sa route, un marcheur vers un sommet de roches et de glaces, tous ces efforts et toutes ces peines, ces épreuves passées, tu continues en prenant ton cœur contre le sien, deux cœurs ouverts qui n’en font qu’un, une lumière au sommet des montagnes, un phare au bout des océans, tu restes vivant, tu entends. Larmes de feu qui lavent tes mensonges et dessillent tes yeux. Honte vaincue, tu te tiens debout sans arrogance et sans mépris. Il n’y a nulle explication nulle preuve à apporter à la vie évidente devant toi. Si elle se trouve dans le génie des lettres, ou celui des couleurs, des formes, des grâces et des architectures, dans cette réalisation qui apparaît fugitive, c’est son miroir, son image pâle. Non, elle n’est pas dans la mort. Dans toutes ces horreurs infligées dont nous n’arrivons pas à nous délivrer. Ces hommes crucifiés, ces sangs versés. Sous le ricanement des possédés, comme des voix d’outre-tombe. Ces faux êtres, fantômes en nous mêmes appauvris, des absences, des gouffres où nous n’avons rien à faire, des puits sans fond.
La vraie vie nous rappelle à ses sommets. Sa beauté pure et envoûtante nous sauve. Nous nous retrouverons.

Et la guerre

Ici nous avons eu la chance de ne pas avoir vécu de guerre. À proprement dit ces destructions et ces morts, nous touchant dans nos chairs, nos proches et nos demeures, impliquant un vainqueur et un vaincu. Malheur aux vaincus, dit-on. C’est tout à fait ça, le résultat des guerres. Le vaincu se plie à la loi du vainqueur, en devient l’esclave. Ou selon une appréciation plus moderne, il est dominé. Celui qui affichait sa splendeur est déchu dans sa défaite. Nous traînons ce boulet de l’humiliation, de la honte, de la fierté bafouée comme nos pauvretés et infériorités, en appelant la revanche, ou la vengeance dans la répétition guerrière.
Pourquoi a -t-on jeté la première pierre ? Parce qu’on nous aurait pris notre terre, nos femmes, volé nos maisons, injurié nos pensées, brisé nos adorations, nous privant de vivre selon notre voie ? Selon ce que nous pensions être notre propriété, au sens qualitatif autant que quantitatif.
Souiller ce que nous avions en propre. Erreurs et ignorance incluses, défauts, tares et tout ce que nous véhiculons depuis des siècles dans nos gènes, et nos mémoires. Cultures et savoir faire, tout cela disparaissant dans les conflits qui avalent les vaincus. Et à l’issue desquels autre chose naît.
Quel homme nouveau va pouvoir renaître sur terre dans une conflagration ultime ? Parce que, a priori nous ne connaissons que le vieil homme, et qu’il nous fait horreur avec son passif. Horreurs partagées d’un peuple à l’autre, humains marqués du sceau de leurs infamies, c’est à dire des souffrances qu’ils infligèrent, de tous temps et en tous lieux. C’est peu de dire que l’homme a mauvais cœur. Ça a été dit et écrit. Mais ce n’est pas le dernier mot, la sentence définitive.
La guerre nous oblige à choisir son camp. Rester neutre et pacifique ne semble pas autorisé. Toute condamnation des exactions et atrocités des uns ou des autres est déjà se situer dans un camp. Cf cette histoire de la chanteuse ukrainienne mariée à un russe, sommée de condamner l’agression russe publiquement et qui de ce fait est bannie de Russie. Ou alors elle aurait dû renoncer à chanter aux Usa.
La parole publique nous engage. Mais plus profondément la parole tout court également. De même que la moindre de nos pensée, et de nos sentiments. Ce qui implique une certaine retenue dans nos affirmations. Sauf si nous nous sentons engagés dans une voie qui s’impose d’elle-même et ne nous laisse aucun choix.
Et avec cette idée que l’opinion commune ne pèse pas face à cela, cette dictée d’ordre transcendantal que chacun est apte à recevoir, et à transmettre en essayant – au mieux – de ne pas trop se tromper. Et au pire de corriger ses erreurs.
Vous savez, ce qui est remarquable c’est ce foisonnement de tous les talents, et le signe contenu dans toutes les œuvres. De quoi nourrir l’Esprit. Et d’y évoluer.
Il ne suffit pas de travailler ou d’enfanter. Le travail rend libre, certes, dans une certaine mesure. Et enfanter ? Quand même, on ne fait pas des enfants pour qu’ils deviennent des soldats et aillent dans les tranchées, tuer les autres ou s’y faire tuer.
On fait des enfants en principe parce qu’ils rapportent des lumières venues des « Cieux ». Ces lumières qui nous manquent.
Époque terrible que celle où on tue les enfants. Et si on fait des enfants sous la pression des états, des églises et des familles, des raisons économiques ?

Petites histoires qui firent cette prétendue grande.

Les bretons vaincus par la France devinrent des français convaincus. Se livrant à la vengeance, s’enrôlant dans les armes. Grimpant dans la hiérarchie et s’enrichissant. Reprenant du poil de la bête, puis assujettissant à son tour les plus faibles, les dominés, conquérant. Reproduisant les mêmes choses qu’il a subi.
Les gens vaincus par Rome portent le glaive de Rome ? Le glaive, cette épée, à la fois celle de la foi et celle du fer ou du feu.
Et puis d’autres causes qui engendrent ces guerres et ces soifs de conquêtes. Comme des transgressions immorales et injustes. Les russes qui furent rackettés par la horde d’or et se soulevèrent pour ne plus subir ce pillage, avec la suite expansionniste que l’on connaît. Et pillant à leur tour pour fonder leur puissance. Que dire des américains ? Ces pionniers pauvres qui désormais dominent le monde aussi violemment. Et imposent l’idée qu’ils sont démocrates. Certes, vous êtes libres de devenir riches et puissants, à condition d’aimer beaucoup l’argent et d’y consacrer tous vos efforts. Comme les protestants, pour qui l’argent est un « don » de Dieu.
Cet or qui arrive parce qu’on a fait la guerre, et qu’il y eut du pillage. Comme les couronnes anglaises, françaises, portugaises, ou espagnoles se livraient à des pillages systématiques des cargaisons ennemies. Vulgaires bandits et criminels.

La vie sauvage

Que vaut la vie des hommes si tout ce qu’ils doivent vivre s’inscrit dans des automatismes répétés et continus ? Ça c’est pour des robots, des mécaniques sans conscience, malgré les systèmes logiques qui les animent. Ce qui fait de nous des hommes c’est cette part imprévisible de nos choix et où chacun d’entre nous s’y détermine. Cela déborde de nos actes, c’est plus profond que les actions individuelles ou collectives, cela concerne nos dispositions intérieures, nos orientations spirituelles, nos désirs et nos amours qui trouvent matière à agir et à penser, à vivre sous l’angle des passions, des feux qui nous animent.
Ceux qui voudraient que nos existences et nos actions soient parfaites, pures, impeccables, sans défaut comme des horloges, des mécanismes de précisions, s’échinent à formater les consciences. Dans ces conditions la conscience se perd dans les automatismes. La vie humaine en perd son sens dans cette prétendue perfection. La vie tout court également. Le prédateur ne sait pas d’avance s’il va saisir sa proie. Le moindre organisme peut vivre ou mourir.
Rien n’est jamais joué avant que le jeu se fasse. La probabilité ne décide de rien. Cela ne veut pas dire que tout n’est qu’incertitudes. La question qui nous concerne avant tout, c’est notre humanité. Notre survie dans cet univers. Survie de l’âme humaine, de sa singularité, de son originalité créatrice, qui se perd ou se noie dans cette infernale domestication de l’homme réduit à l’esclavage. De même que l’animal. La vie la plus vivante est d’essence sauvage. Mais le sauvage n’est pas féroce, aspirant à la cruauté, à faire souffrir, tourmenter ou tarir, priver l’autre de sa vie.

Cher

Que cherches-tu, que fais-tu de tes jours et de tes efforts, que sais-tu de ce qui en sortira et ce qui te transforme ou te conduit à grandir, à accroître tes états de conscience ?
Détrompes-toi si tu penses que tout se vaut, que tout est vain, que le temps d’existence est inutile ou indifférent sauf celui de la bonne ou de la mauvaise fortune, que tout s’efface ou s’effacera, que les résultats aboutissent toujours au même, et qu’il n’y a rien à faire que se laisser écraser par la fatalité qui ferait de nous des ruines ou des cendres, comme si nos amours n’avaient aucun sens, n’étaient pas porteurs de lumière, de vie supérieure, détrompes-toi.
De vie supérieure et de pouvoirs. Au sens le plus élevé de créateur. Interroge toi sur le bien fondé du mal dont tu as à te délivrer.
L’intelligence peut être poison mortel, au même titre que l’imbécillité ou l’ignorance, la mauvaise foi ou la méchanceté. Évidemment, elle a un sens malgré sa toxicité, les souffrances qu’elle inflige. Cela nous oblige à aller chercher l’eau pure à la source si nous voulons vivre, si nous ne voulons pas être retenus otages indéfiniment des perversions de ceux qui se croient des esprits forts. Et s’avèrent assassins.
Face à l’emprise qui s’exerce sur nous et nos faiblesses, tout semble jouer contre nous, sans recours. Comme si nous ne pouvions qu’aboyer, ou pleurer. Et qu’il n’y aurait nulle consolation, nulle espérance. Nulle lumière au bout du chemin.