Se pencher sur nous mêmes

La science qui se penche sur les mythes, comme un objet à analyser, évidemment ne croit pas une seconde à la validité du mythe en lui-même, n’y voyant là que de l’ignorance venue des tréfonds les plus reculés du passé des ignorances. Ce qui semble donner un crédit fort aux sciences contemporaines et leurs corpus de représentations. Sauf que la science actuelle au lieu de ces mythes d’émergence naïfs, ou natifs, nous fait sortir d’un puits sans fond de l’espace temps, d’un puits où au fond il n’y a rien qu’un processus d’énergie, un événement passé, et d’où on extrait une volonté de prédictions et donc de possession de vérités ultimes, par conséquent du savoir à l’état pur et « objectif », définitif, débarrassé de toute croyance.

Du moins, c’est dans cette direction que la science actuelle pose ses principes, en prétendant sonder dans les origines et renvoie le reste à des chimères, de l’imaginaire sans queue ni tête.

Or l’origine, on ne peut qu’y être encore présent. Il fait partie de nous, mais se révèle parmi ceux qui s’y penchent, et non qui se penchent sur ce que d’autres purent penser, dessiner ou imager, bref, c’est un objet intérieur, invisible, non factuel. qu’on ne peut par conséquent que rendre de façon symbolique, mythique, comme des prières.

Ceci n’enlève rien à la science, sauf son emprise sur nos esprits. Par delà la science humaine on découvre une science divine, ou une science incluse dans les éléments ou en tout, ainsi que ses finalités.
Si on demande au robot de nous éclairer, on va sérieusement être embrouillé. Normal, puisqu’il n’est que le fruit d’humains.
Vous savez qu’il n’y a pas que ce plan humain de la machine. 

Croi croi

Un scientifique affirme ne rien croire. Disant cela il se drape dans une certitude. Celle que ses mots sont justes. Il croit au moins dans ses mots et ce qu’ils veulent dire, sinon il se tairait en proie à un doute absolu, du fait de l’ignorance, celle qui fonde la science et la recherche, la sienne y comprise.
Alors a fortiori, les hommes dans leur ensemble, sachant qu’ils en savent encore moins que les savants, sont bien obligés de croire, avec ce que cette façon de procéder implique, pour ne serait-ce que pouvoir vivre et supporter l’existence.
Il demeure des points incontournables au sein des psychés ayant des effets puissants. La peur, l’angoisse, la souffrance, la maladie et la mort, le sang et les ossements. La faim et le désir, la soif et le plaisir, la jouissance, le sentiment de beau ou de larmes qui nous traversent, sans qu’on sache pourquoi. Forcés donc de croire à tout cela, induisant une dimension de Mystère, exprimé sous d’infinies formes, par d’infinis moyens, et en nombre aussi nombreux que d’humains.
Le Matériau en nos esprits ne manque pas. Nous savons que cela n’est pas rien même si nous ne savons pas résoudre les équations d’Einstein, ou n’avons pas d’explications relatives à notre existence en ce lieu terrestre isolé dans ces univers.
Croire, c’est un mode de la pensée pure, en nous, qui essaie simplement de reconstituer son parcours, ou sa vie.
Dans cette logique, il semble normal que face à l’approche savante, il se trouve l’art – en général. Cela fait partie de l’humanité en quête d’elle-même, par les questions que l’art soulève, ou l’exposition de son intériorité sur les murs, où des hommes savaient ce qu’ils voyaient.
Le Sujet est inépuisable. Si elle ne veut pas tomber dans l’insignifiance et ou le néant, et nous y entraîner, la Science est bien obligée de croire à l’objectivité du sujet, tout comme à l’existence de l’âme diffuse hors de nous. Ce qui n’est pas tout à fait rien.

Voir l’œil. Voir l’anneau ou la boucle. Le dire ou l’écrire ne dit rien. L’expliquer le noue de façon insignifiante. Il y a une verticalité abyssale. Et si elle nous prend, nous ne pouvons la saisir. C’est comme une colonne. Si nous essayons de la penser elle nous échappe. Nous ne pouvons à la rigueur que de se laisser penser. Un peu zen, tout ça, me semble-t-il.

Trans Maître

Rien ne va sans transmission. Une donnée transmise reste intacte. Il n’y a nulle perte d’une génération à l’autre. S’il y a des pertes ou des défauts cela se passe dans la transmission et non dans les données.
L’objet dont il est question ici n’est pas dégradable. Ça passe ou rien ne se passe. Ça ne passe que s’il y a une certaine pureté possible. D’où le fait des épreuves de purification qui sont imposées aux récepteurs potentiels. La pureté n’est pas une fin en soi.

Si le pur était la fin, nous perdrions en chemin ce qui n’est pas pur. Et, ça fait beaucoup de vies gâchées.

Trans maître, trans mission, la mission vient du maître, Rien n’est forcé. Contrairement à ce qu’on sait des contraintes et violences exercées sur les esprits, au nom du Pur.

Il y a un sens à cela.

il y a un sens, tout comme le temps a un sens. Et puis ce sens est secret, un secret que tout le monde connaît, qui gît même dans l’impur. Tout comme il y a un sens à engendrer, voir vivre ses enfants, et les générations se suivre, et se pousser à vivre.

et donc, se sauver. Le Maître vient se sauver dans les hommes qui se sauvent et se reconnaissent enfin.

Signe

Avant le mythe il y a le signe comme avant l’écrit il y a le cri.

Le signe s’est imposé à nous et nous a traversé, invisible et fulgurant, silencieux effrayant et merveilleux, mouvement immobile qui nous pénètre de son absence. Nous émettions des sons animaux, utiles. Nous ne savions pas qu’il y avait un autre monde qui pouvait s’inscrire dans notre œil, forçant celui-ci à s’ouvrir. Puis un signe, deux, un nombre conséquent, chargé de multiples sens, et nous confondant. Sidérés face à l’abîme. Nus devant les mondes, c’est à dire nous sentant insignifiants face à eux qui nous parlent.
Cela nous secoue.

Nous ne pouvions plus nous taire ou nous satisfaire des sons utilitaires qui passent, des gestes ou des pratiques. Il fallait traduire les signes subjectifs en signes objectifs, et ainsi dessiner les signes muets invisibles en visibles.
L’art est une expérience des profondeurs qui nous brûle sur les bords et nous expose, parce que nous y mettons notre âme nue. Et prenons des risques comme dans un miroir, où le voile se déchire ou se soulève.
Il s’y passe quelque chose qui forcément nous atteint dans notre psychisme fou, conscient du bas et du haut, de l’illimité et de notre finitude.
Il est possible alors que nous commencions à progresser en rendant grâce à ces présences douces à nos côtés, cheval, bison, rennes, en les dessinant et coloriant couleur sang.
Cela nous apaise.

Des premières données

Il est difficile de penser que les hommes, depuis que l’on sait que nous sommes les mêmes depuis si longtemps, n’aient pas étés traversés par ce qui nous touche aujourd’hui, nous effraie ou nous émerveille. Et donc aient eu ce besoin de l’exprimer comme nous en avons le besoin. Ce ne sont pas des affaires de croyances qui sont à la base de toutes ces créations. Mais me semble-t-il un impératif intérieur subjectif, la « Beauté » en tant que force vivante, présente dans la forme animée et animale. S’il y eut si peu de scène d’ordre sexuel, cela s’explique sans doute que ce n’est pas la priorité des anciens, qui devaient avant tout, se nourrir, se vêtir, se chauffer, s’abriter, et donc ils n’avaient guère trop de loisirs pour la chose.

Cet aspect double de l’effroi ou de l’émerveillement s’impose comme donnée première, et universelle

Tout, c’est tout.

Quand on se penche sur cette totalité, cette quantité en nombre illimité des objets mis à notre disposition qui nous questionnent, concentrée en ce lieu si spécial terrestre, il y a de quoi faire, satisfaire notre curiosité et notre soif de vivre. Les matériaux du passé ne manquent pas et même ce passé qui nous vient de la lumière des étoiles et des exoplanètes.
Le passé est rempli. De pyramides, de tombeaux, de pierres levées, de flèches et de silex, de dessins, d’ossements, de rayonnements fossiles, d’énigmes, d’œuvres d’art et d’histoires. La terre est comme un être vivant créateur d’infinité de formes et d’événements laissant ses traces, comme expressions à la fois d’une nature et d’une conscience, surnaturelles, réalisatrices et singulières.
Et puis il y a cette banalité des temps présents vides, moments d’existences insignifiants comme ces mots et polémiques autour d’une bière. Ça pullule et c’est vide de sens, plein des malheurs et de mauvais jugements.
Peut-être parce qu’il y manque cette vision d’un futur transparent ? Je ne crois pas que le passé créera le futur. Les événements du passé sont morts. Nous sommes en vie dans le souvenir de ce qui vient, où nous pouvons être acteurs, et réalisateurs d’autres choses, d’autres signes.
Laissons ici ces pléthores d’objets, qui sont déjà en ruine.
Juste, prenons soin des sources pures.

De l’Art comme signe

L’âme est âme de dieu, et par extension l’âme de Dieu.
Nous compliquons l’âme, qui ne peut s’épanouir en nous, en étant murée. Elle se tient en retrait, distante. Elle ne nous parle plus, ne dit plus rien.
Au lieu de nous en rapprocher, nous nous attachons à ce qui nous perd, nous égare et ne cesse de produire ces chocs et ces violences. Ce n’est pas pour rien, mais pour que nous renversions notre regard. Les maux sont des signes clairs.

On peut toujours dénoncer les exactions des uns et des autres, cela ne peut se modifier si nous n’avons pas une claire conscience de cette question d’âme, de la lumière qu’elle porte, lumière sans voix, qui est à proprement dit la voix.
Nous ne sommes pas sans ressources pour voir et entendre, il y a de l’art, inclus dans la Nature. Mais, Il ne faut pas que nous rendions ou prenions la nature en artifice, en artefact factice, ou faux. La vie vraie est un artifice naturel. Et non une nature artificielle modifiable à notre guise, selon notre volonté ou notre ignorance.

Comment, par qui ce renversement de notre regard peut s’opérer, et de la nuit passer à la lumière ? C’est le Passage obligé.

Je songe au fait des parents. Nos pères et mères ne savent pas, de même que leurs pères et leurs mères. Ils sont forcément obstacles à tout cheminement vers notre âme éloignée. Ils nous retiennent auprès d’eux, de leurs conditionnements, qui font mur. Pour voir et passer, il nous faut suivre un enseignement renversant.
Nous retrouvons, une fois ce passage effectué, dans la lumière, l’âme de nos pères et mères, la même que la notre. Ce qui tout de même implique de grandes transformations avant d’atteindre cet objectif, parce que nous ne sommes pas à proprement dit nés d’eux. Si nous sommes venus sur terre par eux, nous étions avant d’être ici.
Ainsi nous étions dans l’âme de « dieu » avant tout, avant de tomber dans ce monde obscur, crépusculaire où nos parents devaient se débattre dans leurs propres zones obscures. Or, l’enfant pour s’édifier ne peut prendre que la part lumineuse, et se révolter contre la part sombre, tout cela dans les fonds subconscients.
Évidemment la pure lumière est difficilement acceptée par l’ensemble des hommes, puisqu’elle nous oblige à mettre nos parents en retrait, spirituellement.
Être parent, c’est avant tout un devoir. Une propulsion des enfants en avant vers leur lumière, vers leur inconnu, que les parents ne peuvent connaître. Et non les retenir dans nos murs.

Pour les parents, c’est à dire les enfants que nous étions, cela ne regarde qu’eux dans leur intimité, l’intime de l’âme qui nous sert de guide exclusif pour notre épanouissement.

Il est tout à fait légitime de se demander quelle relation peut-il y avoir entre l’âme et les affaires du monde.
Sortir des sentiers battus : Il est convenu que le monde n’a que ses affaires à régler, sans s’occuper d’autre chose. Le monde croit qu’en réglant ses affaires, ses problèmes strictement terre à terre est un objectif suffisant, comme de soigner ses effets et se limiter à cela, ou se borner à croire sans plus, à ce qui se produit au cours de cette existence prise entre deux néants. Comme si le fait matériel était le tout, expliqué au mieux par le fait scientifique, et à la limite par le fait spirituel mais qui demeure une affaire personnelle. Et dont on ne peut rien en dire ni tirer de conclusions.
Et encore moins de preuves. Tout juste si on peut l’exprimer par les créations artistiques. Et que celles-ci nous regardent sans offrir de moyens supplémentaires de connaissance. Comme si l’Art n’était qu’une forme de passe-temps, de loisir pour rendre nos jours agréables. Alors que cela reflète une urgence. Nous entrons dans le vif du sujet en approfondissant les contenus des arts.
Alors la question est celle justement des contenus offerts au monde. Et des formes montrées, créées. De tout ce qui est caché. Des secrets de l’âme, ce qui se joue dans cette relation à deux, et qui s’y révèle et se crée.
Il est question de l’homme et de la femme, de la puissance du désir. De cette tension ou cette force du Mystère, et de la mise à nu de notre âme. Et de ses accidents qui s’y produisent ayant des effets considérables, dans les affaires du monde. Question de pur et d’impur, d’union ou de séparation, de bien commun, ou de bien perdu, de chuter ou de se relever.
Tout est loin d’être bon à exposer. Les boues s’étalent à la face du monde, comme si c’était des lumières. Ou inversement, des pensées prétendument pures nous privent de vivre selon nos rythmes propres, notre évolution ou nos besoins. Nous sommes pris entre des puritanismes déments et des obscénités également démentes, ce qui trouble la vue des enfants.
Le sexe ne peut être que ce lieu hors de nous, hors norme, tension et fusion de féminin et de masculin, énigme de la chair double qui frôle l’Un.
L’âme se joue à deux. Mais deux étant sexuellement de l’autre sexe, se complétant. Le sexe est forcément insuffisant pour fonder une existence viable commune. Mon dieu, quelle porte ouverte…
Il y a l’amour aussi entre deux, qui doit l’emporter. Dans cet esprit là, le sexe est secondaire. Une amitié amoureuse peut se passer de copuler. Ou disons, peut rester chaste, ce qui est nettement plus sain que l’excès.
Un point important est d’être deux, au sens d’être. Il n’y a pas un être sujet et un être objet. Le monde retrouve son âme. Le voile révèle ses lumières.
Nous retrouvons nos habits originels par le truchement des chants, des dessins, des formes que nous créons et que nous pouvons contempler.

De la beauté

Nous existons mal si nous ne sommes pas traversés par la beauté. Le beau, la beauté, la splendeur, la merveille, inonde le monde de sa vie, de sa présence, que nous recevons, ou ne recevons pas.

Depuis que nous existons sur terre, retenus captifs de cette condition, réfugiés dans des cavernes, faibles dans nos corps, nous sentant séparés du fait de la conscience, séparés et nus face à l’univers, nous souvenant de quelque chose d’autre que ces corps et ces temps, effectuant le constat de notre fragilité s’est imposée cette soif de beauté comme une vérité vivante, une eau brillante, ou un feu doux. Beauté et Amour, chassant la mort et la laideur du sang qui coule et des blessures.

Initialement ce ne serait que par le biais du chant, du dessin, de la danse, des ornements, et peut-être d’autres moyens ( lesquels?) que nous exprimions cette chose en fonction de nos dons respectifs, des dons reçus, remontant à des origines
enfouies et oubliées.

Bref, tout cela est de l’art. L’art est « gratuit ». Ça veut dire que nous rendons grâce grâce à l’art. Dans l’acte de beauté créatrice, nous saisissons l’image de la vie qui nous échappe. De l’image ou de la magie incluse et mystérieuse.

Comment pourraient vivre n’importe quel être conscient sans ce mystère ? Attracteur incroyable qui nous extasie dans ces moments exprimés. Nous retrouvons nos habits de lumière.

Il est tout à fait pensable que le chaman, le sorcier, ne soit pas si bénéfique que ça. Mais que parmi les figures présentes il s’est toujours trouvé là, avec ses ambiguïtés, sa duplicité, et forcément ses pouvoirs manipulateurs des hommes, dans le bien et le mal. Et ce qui se trouve aujourd’hui comme complications, explications qui embrouillent.

Confusions telles qu’entre le Mystère, l’esprit saint, ou entre le plan divin et humain, nous peinons à nous y retrouver.

Confusion des langues aussi et des discours, du sens et de nos sens.
Comment voir dans la nuit ?