Résurrection

Je ne parle pas ici d’une histoire, mais d’un process.

Voici que parmi nous, un seul réussit l’exploit de vivre, de mourir et de ressusciter. Après avoir vécu, éprouvé, avoir vu et donné de sa vie, enseigné et montré la voie. Ouvrant dans ces épreuves ultimes, dans ces souffrances qui serait humainement insupportables, et passant ce mur du trépas.
Peu importe la nature du Christ. Les théologiens parlent pour ne rien dire. S’il fut Dieu, il est venu en Homme. Et homme qui revint vers Dieu. Mais ce retour est une épreuve de force même pour dieu, dans sa nature d’homme. Une épreuve de vérité, de foi, comme vous voulez.
Mais, en principe et en fait cette voie ouverte par « lui ». ne nous dispense pas du tout de la pratiquer à notre tour, de jours en jours, et de subir les mêmes épreuves de vérité. À la différence que nous les aurions reçues de la bouche de quelqu’un de chair sensible, ces vérités, alors que « lui » a dû les recevoir d’une autre façon, et personne pour lui tenir la main.

Nous, nous aurions terriblement douté, et serions probablement mort avant de passer le cap. Nous aurions avorté en quelque sorte, n’étant pas en mesure d’accomplir ces mêmes missions, d’ordre surhumain. Signées et voulues par les plus hautes instances, nettement au-dessus des institutions et des dogmes qui firent barrage. D’où ce sacrifice. Sacre i fils.

Pourquoi tout cela, et pourquoi « lui » ? Peut-être pour la raison qu’« elle » a donné son fils. Et en plus ne pourrait donner plus. Épreuve d’homme donc.

À raccorder à…

La mère a laissé un fils venir en ces mondes. Pour le rachat, pour des raisons secrètes ou connues des cieux, sachant les risques encourus, dans cette négativité du monde enfermé ne voulant rien entendre, ce qui est cause de souffrances inouïes pour les innocents, et ne peuvent en aucun cas passer, être pardonnées en l’état.

Il fallait que quelqu’un vienne. Pour « sauver » et redonner l’Amour. Sans quoi tout agonise. Ou pour que nous puissions simplement vivre sur cette terre sans être affligé de tous ces maux, dont nous ne savons plus comment faire pour nous en délivrer.

La suite, selon ce que vous voulez. Vivre, mourir et ressusciter, comme Lui.

Cela dans l’Œuf

Cette montagne

Nous rendons-nous compte de notre position si petite dans l’espace et aussi bien dans les temps, notre durée sur terre passant vite, de même les millénaires qui sont si peu face aux passés et futurs. Tous ces remuements semblent bien peu de choses, apparemment.
Se mesurer à l’univers ne donne rien, si nous ne trouvons pas notre place, ce que nous sommes en vérité dans tous ces tourbillons. C’est pourquoi les hommes ont l’imagination débordante. Et tant qu’à faire, imaginer juste et non des choses chimériques, des feux de paille. Dans ce sens imaginé, le moi dont chacun est en principe pourvu, reste énigmatique et ne cesse de progresser vers quelque moi supérieur plus profond se raccordant à l’autre moi, dans cette humanité censée être une, et ne pouvant à la réflexion n’être que cela pour pouvoir embrasser plus largement. Ce qui fait que quelque part nous ne mourons pas. Pour le moins, la mort n’a plus le même sens, la même définition.
*
Le but du jeu, le jeu même, est de retrouver le lieu où nous sommes, en passant par ces labyrinthes des expériences, des épreuves, par ces dédales de la pensée et de tout ce qui se présente, sachant qu’il n’en manque pas, du fil à retordre dans ce champ existentiel, que d’aucuns prennent comme illusion négative face aux cieux et à ses habitants.
Ces habitants sont Nous. Que cette lumière soit perçue intuitivement, subjective et intime.
Me direz-vous, à quoi cela sert pour notre vie terrestre ? Qu’est-ce que le fait de savoir ce qui est une forme d’éternité, la nôtre, et celle des autres, peut faire pour cette vie relative et éphémère, qu’on croit mortelle ?
Plus important qu’on croit. Ce regard porté, cette vision reçue détermine notre appréhension du vivant dans ses beaux vêtements. Même si tout ce qui apparaît est illusion, voile où se cache la Vie vraie, cette illusion, ce film est parlant, par ses couleurs, ses sons, ses formes, ses êtres multiples, ses montagnes. Parlant aussi par ses évènements, comme des soubresauts de poisson qui remue dans la barque, ses combats de Titan. Ce monde-ci n’est pas de tout repos.
Le repos éternel, vous n’en voudriez pas. Et pour cause, qu’y ferions-nous ? Comme si nous pouvions aspirer à ne rien voir, ou ne rien faire, n’éprouver nulle joie ou nulle peine, du côté de l’Olympe.
Ce royaume habité – par qui mon dieu ? – invisible aujourd’hui à nos yeux, inexistant, rêve de poètes ou de fous, peut-être pensée logique et raisonnée malgré cette impossible saisie, comme la permanence après l’orage, le ciel bleu revenu. Tout ceci en nous-mêmes.
Je reviens à la montagne. Face à elle, dès que vous la voyez, vous vous prosternez à ses pieds.
Cela nous fait grandir.

Mériter

Celui qui aime a du mérite. Il ne doit son amour qu’à l’Amour, et le rend à celui qui en manque. Que vaut un amour qu’on garderait pour soi ? Être aimé et ne pas aimer en retour, interrompre la chaîne ou le flux, faire semblant d’aimer et calculer les bénéfices, revient à s’enfermer avec sa mort dans la négation de l’Amour universel.

Quand le monde est fermé, celui qui aime a du mérite. Il sait qu’il ne sera pas aimé en retour, et même, devra subir la noirceur et la mort des hommes rendus à ces points extrêmes sans amour des mondes indifférents, des cercles clos. De cette haine qui apparaît dès lors qu’on réveille les morts, confrontés à l’obligation de vivre et d’accepter l’amour et le processus de la conscience conjointe.

L’amour est un miroir qui nous montre tel que nous sommes dans cette pauvreté. Et si nous sommes riches, ce n’est que d’avoir pris l’amour, de l’avoir fait vivre, et de semer. Il ne se perd pas dès lors qu’on le rend.

Il n’est pas faux de dire que l’amour est « matière ». Énergie au cœur de la matière visible, énergie créatrice d’harmonie. Et de résurrection des morts.
Si la terre vit encore, c’est par ceux qui firent vivre cet amour, et la lumière qu’il contient, qui fut diffusé parmi les hommes et rendu à la terre. Par la pensée, sans arrière pensée mauvaise, par les mots doux et les mots justes, par les actes bons et les actes courageux.

L’amour renaît par les vivants, et non par les morts.
Quand on meurt on rejoint son amour, l’amour qu’on a donné. Celui qui a donné de la mort, quelle vie l’attend, s’il ne se reprend pas, s’il ne fait nul effort pour se racheter. Dans cette idée là, nous avons tous nos parts faibles à racheter, nos défauts, nos lâchetés, nos masques, nos mesquines pensées, jalousies, envies, nos vices cachés. Sinon ne serions pas humains. Et nous serions ailleurs que sur cette terre.

Ici pour ce rachat de nos âmes perdues, il n’y a que ces miracles-ci : Un envoyé, ou dix mille possibles par qui passe l’amour et ses lumières, devant supporter ce monde mourant et le renverser avant qu’il ne meure et s’entre tue.

Vous me demanderez pourquoi sommes-nous sur terre si c’est pour la quitter un jour ? Sans doute faut-il songer à tout ce que nous avons appris au cours de cette existence, ce qui nous a transformé intimement. Cette vie intérieure ou cette mort intérieure qui nous habitait et que nous habitions, ce réel fantomatique comme informatique.
C’est pour cette raison que la barque est pleine. Suffisamment. Par conséquent, qu’il est inutile de jeter par dessus bord les hommes. Ou de croître encore plus.

Il est « utile » de passer de la mort à la vie. Sens de la Pâques. Et raison de sa fête.

Hier, en voiture je m’arrêtais pour ramasser un bidon tombé de ma remorque ( peu importe les circonstances) et vit une mésange morte sur le bas côté de la route. Que de cadavres laissons nous et que de déchets, avec nos œuvres qui se disent nécessaires.
Les œuvres de mort, non il ne faut pas.
De Noël comme une semence, à Pâques comme l’éclosion d’un œuf, tout cela est censé être vivant.
Toujours trop de mots. Jamais trop de mésanges.

Poussière d’étoiles

Il y a autant d’hommes que d’étoiles. Ça fait un ciel constellé d’humanités diverses. Et tout cela se tient.
Ne peut-on penser qu’à partir de notre existence terrienne en quoi consiste notre existence dépassant le cadre étroit, franchissant toutes les limites où nous sommes encore ? Sans s’égarer, ou faire naufrage. Il nous faut garder raison. Mais la raison n’appartient pas à un seul.
Elle est relative à l’assemblée. En cet esprit là, il n’y a qu’une seule religion, c’est celle qui nous rassemble. Même s’il y a plusieurs assemblées, plusieurs écoles, moyens ou méthodes, langages pour s’assembler. La contradiction n’est pas pour diviser, disperser les hommes ou les égarer, en principe. Ce qui nous trompe relève d’autre chose. Comme des murs sectaires. Plus personne n’entend. Dans ce monde sourd, se déroulent toutes sortes de tragédies et de violences. Toutes ces violences s’exercent les unes contre les autres en assemblées guerrières, mortifères. Signe d’un échec comme une humanité échouée.
Des religions qui divisent au lieu d’assembler. Des religieux qui voulurent des pouvoirs au lieu d’en donner, de même que des empires puissants se formèrent, réduisant les hommes à l’impuissance.
Mais il y eut « en » certains d’entre nous, comme par enchantement, des états supérieurs, des états de Bouddha ou de Christ, des états de pensée prophétique. Ceci, plus souvent qu’on ne pense.
Venant, revenant.
Mais non pour fonder une religion, un système doctrinaire, scientifique, ou de raison pure, exclusive. Mais nous sortir de ces empires et de leurs pesantes chaînes. Quand ce fut trop pesant.
Et, sans doute, probablement, pour poser quelque première pierre d’un édifice où nous nous retrouvons, où nous nous édifions après ces déconstructions, ces pensées décomposées où il ne nous reste rien. Comme si le monde tombait en déliquescence et dispersion. Au lieu de se voir comme autant d’étoiles.

*

Rome est exemplaire. Ou disons, cet Occident où nous nous tenons. Et qui ne comprend pas trop bien l’Orient. Peut-être qu’il ne se comprend pas lui-même dans sa vocation ? Et n’a pas entendu ou respecté les enseignements. Rejeté la pierre d’angle.
Ou prenant cette pierre comme de la silice, du grès ou du granite pour dresser des forteresses, des temples ou des pyramides, des tombeaux.
Cette pierre, ces Pierre, c’est rigoureusement nous pétrifiés.
Pierre pétrifié. Tétanisé d’effroi face à ce serpent. (entre autres). Dans cet état paralysé, que pouvait Pierre ? ( je parle d’un Simon fictif, imaginé )
Il pouvait, malgré tout, parler. Émettre quelques signaux à ses proches, mobiles et rêveurs, pour lui-même d’abord, pour se sentir encore en vie, pour se tenir debout et ne pas succomber. Vous connaissez les testaments. Pierre terrassé rassi. Il se rassoit, comme on demande à celui à qui on apprend une nouvelle terrible, pour qu’il ne tombe pas. Cela lui tombe sur les épaules. Il n’aurait eu qu’à chercher des soutiens, en éclairant les hommes de proches en proches, ce qui évidemment nous pétrifie tous et nous sidère, mais dans cette sidération collective le poids s’allège.

Pourquoi donc tout a déraillé ? Par quel élément incongru ?
Je songe à Paul et d’autres épaules de bonne foi, voulant accélérer le processus, l’amplifier et construire un appareil ayant de la force et des pouvoirs, de même que des écrits, lui qui venait du Livre et des Tables de la loi. On sait que les textes furent tardifs.
Alors que Jésus s’effaçait sur le sable. Là où nous nous retrouvons en poussières.
Paul a beaucoup composé avec l’empire romain, selon ce qu’on apprend dans le dictionnaire. Tandis que Pierre n’a pas fait d’histoire, mais a donné des éléments intelligibles assez miraculeux. On en a fait des contes, des évangiles, de l’irrationnel. Comme si c’était possible de rationaliser l’irrationnel, et que cet irrationnel puisse rester irrationnel dans ces logiques. Non, il se perd, se dégrade, et se fige dans des pierres, des marbres, des images et des temps en suspens.
On passe à côté. On en perd l’esprit censé être rendu. Cet esprit qui devait nous rassembler, sans que rien ne fut forcé. Mais s’imposer à nous sous le simple, l’évidence, et le joyeux, comme les nains.
Vous savez bien que les religions telles qu’elles sont, sont des outils politiques. Avec un léger accent spirituel pour faire bonne figure. Mais nous en perdons de vue l’essentiel, qui ne vit plus en nous, pire, qui nous mine par son absence. Et quand il y a présence, ce grand fantôme nous effraie.
Disons que nous le prenons comme un fantôme ou un spectre, ce qu’il « n’est pas ».
En résumé, le politique a pris les pas sur le spirituel, la volonté de rendre tangible l’intangible ou l’insaisissable vivant.

Et ici ce texte est bien trop pesant.

Que peut la plume

Peut-elle de ses ailes te faire entendre
ce ciel que tu oublies
qui se ferme et qui crie
cette folie des morts le long des routes
les terres agonisantes des oiseaux et des poissons crevés
Peut-elle te faire sentir la douleur du cœur
meurtri par tes lames dans la maudite blessure
qui te demande pardon
et te donne ses mains.

Quels sont ces amours morts qui nous tuent ?

Ce que nous sommes

Ce n’est pas parce que nous pouvons avoir une vue télescopique des confins cosmiques que nous y sommes. Nous n’y sommes pas. Nous sommes ici à regarder une image, tout simplement. Où sommes-nous en vérité, dans cet être rempli de vide ? De même dans le fond profond.
On ne sort pas de notre humanité, quoiqu’on fasse. Et selon ce qu’on fait, soit on s’enfonce dans des souffrances, soit on s’en délivre. Savoir ce qu’est faire, savoir la signification de l’action, de l’agir, de même que la pensée, ou la psyché agissante.
L’esprit pouvant nous épouvante en nous éprouvant.
Mais ce n’est pas tout. Cela ne s’achève pas là. Où sommes-nous dans ce cosmos comme dans ce corps qui est le nôtre ? Comme nous sommes censés transcender notre propre corps qui en réalité nous échappe, le corps de ces univers est aussi le nôtre, mais de façon collective, en nombre illimité et en qualité illimitée. C’est pourquoi il n’y a qu’une Humanité, procédant de la Nature pour son existence, et du divin ou du diabolique pour son chemin, pour que cela nous appartienne.
Or, si on songe à ce pitoyable état dans lequel nous sommes en ce corps maladif, comment pourrions-nous supporter d’être dans un corps encore plus grand et plus lointain, oublié, méprisé ?
Il ne s’agit donc pas que cette existence contingente à modifier, d’aménagements de ces châteaux et masures, de ces parures et apparences malgré les signes que celle-ci véhicule.
De quel objet s’agit-il ? Quel est l’objet de notre existence à la fois dans cette vie et dans les autres vies, que ces vies soient la notre ou celle des autres ? Et quels sont les moyens pour atteindre ces objectifs ?
S’il faut penser, il faut savoir d’où nous viennent ces pensées, de même que leur nature. Et comment se cultive-t-elle et par qui ?
Qui donc nous inspire, nous informe, infuse de l’information dans la forme ? Par nos actes, par nos mots, l’information nous revient, nous en sommes quelque part les auteurs, ce qui nous demande des efforts de discernement et de choix.

Rien n’est nul

Il nous faut tenir jusqu’au bout, non pas la paix, mais cette existence, malgré tout. Tout ce que nous savons. Comme de savoir que ceci n’est qu’un domaine exclusivement composé d’apparences, d’images se déroulant dans le champ éphémère de nos perceptions, une sorte de tricherie du réel. Nous n’éprouvons pas la rotation réelle de la terre sur elle-même ou autour du soleil, ni la pesanteur des profondeurs, tout comme il nous est insoutenable de penser l’immensité du cosmos, et son infini. Le réel objectif est insupportable pour notre existence, dans notre conscience, elle ne pourrait qu’éclater, nous rendant fou. Le moindre atome considéré dans sa réalité est chargé d’énergies et de mouvements, nos cellules et toutes celles étrangères qui nous habitent et composent notre corps vivant sont impensables dans le quotidien « normal ». Nous n’y pensons pas. La terre est plane et bossue pour nos perceptions habituelles. Et puis nous vivons aussi selon cette apparence de la stabilité du présent, sans se tourmenter outre mesure de la nature de l’éternité.
En quelque sorte, nous ne pourrions soutenir un savoir absolu des choses, dans notre conscience, de façon permanente. Nous ne pouvons le penser que par étincelles.

L’amour ou la puissance essentielle conjointe à l’existant, ne nous arrive que sous une forme atténuée, comme les sons qui arrivent à nos oreilles ne sont pas des sons à l’état brut des éclatements de la matière et du fracas réel des éléments qui s’entrechoquent, de ses grondements internes et sourds. Le réel est monstrueux dans son feu. Son corps nous semblant sans conscience. Et nous comme Jonas dans le ventre de la baleine.
Si nous étions du même Amour que cet absolu, nous ne resterions pas dans cette étroitesse de notre corps, nous rejoindrions le soleil.

Ceci ne dit rien sur la nécessité de notre petitesse, de cette existence ralentie, aqueuse, terres éteintes de pierre et de glace. Il se passe des choses à notre insu. Ce ne sont plus des choses mais de la présence, de la volonté, de l’amour tel que nous pouvons aimer dans la mesure exacte où l’amour aussi nous aime. Et nous soutient.
Je veux dire, que celui qui aimerait d’un amour fou sans écho dans le monde, sans être aimé en retour ne pourrait vivre, il serait dans une souffrance inimaginable. Alors s’enfermerait-il dans une haine insondable, destructrice de tout dans sa méchanceté. C’est en cela que consiste cette malédiction. Comme un malade sans médecine.(l’inverse est possible, mais c’est toute une histoire)
Il ne semble pas que ceci soit éternel. Ou alors il n’y aurait personne dans ces univers. Personne pour répondre à l’autre, ou garder le silence aimant, fort, soutenant le faible, le petit.
On sait que ce n’est pas ainsi, qu’il y a des gens, des animaux aimants, une terre aimante et vivante, une nature époustouflante de beauté. Cela devrait suffire à supporter le temps, et nous ouvrir.
Ensuite, chacun prend et se nourrit de ce dont il a besoin. Des loups et des moutons cohabitent, paisiblement.

Normal ou pas ?

Ce qui n’est pas normal nous indique la norme, tout comme la folie la sagesse. Il ne devrait pas y avoir d’ambiguïté, on ne fait pas rentrer l’anormal dans la norme, ou penser que l’anormal est la nouvelle norme à laquelle on doit se conformer. Chacun d’entre nous a son anormalité, sa pensée irrationnelle, ses lubies ou ses visions propres, comme ses erreurs et ses vérités qui n’évoquent rien pour un autre et ne lui sont pas utiles.
Puis, quand apparaît un réel péril tout le monde se retrouve à devoir penser la même chose. Ne faut-il que ces moments périlleux pour que les gens se rassemblent ? Et que dans les temps où tout va bien ou paraît aller bien, chacun se contente de son petit train de vie, de ses revenus et travaux, sans penser trop loin. C’est normal de vivre tranquillement, doucement, sans se précipiter.
Mais ce n’est jamais comme ça cela, on est toujours repris par des événements incontrôlables, anormaux. Ceux-ci nous mettent face à des énigmes, des puissances inconnues, des profondeurs et des phénomènes hors de notre champ habituel. Ça fait un choc toutes ces choses extérieures à la terre, l’habitat naturel. Comme ces mégalithes dont on ne sait plus rien, que nous serions incapables de soulever, avec nos moyens actuels, ou ces pyramides infernales à construire. Dans le même ordre d’idée les égyptiens des temps lointains seraient peut-être subjugués face à nos écrans de télévision, nos bombes atomiques et y verraient le doigt possible des Dieux. Ou disons, ces choses n’étant pas dans les normes, pas tellement dans la nature simple et sont peut-être incongrus. N’ayant nulle nécessité mais s’imposent malgré tout. On peut exister sans pyramide, arme atomique, télescope astronomique, sans sonder dans les premières particules, ou devoir voir toutes les œuvres et tous les livres, toutes les histoires.
Mais de quoi notre vie est faite, donnant à vivre ?
Je songe aux œuvres d’art ou d’artifices, qui n’ont rien de normal, de naturel, ces inventions et artefacts, ces trucs étranges devant nos yeux. Mais sans lesquels nous ne serions pas ce que nous sommes.
La terre a tellement de visages, extrêmes de tous les côtés qui ne la perturbent pas dans son existence, mais nous mettent dans des situations qui nous questionnent. Nous explorons, nous expérimentons tout ce qu’il est possible. Mais est-ce que tout doit être vécu ?
Est-ce que ces vécus extrêmes qui nous perdent doivent être essayés ? Comme si nous n’avions pas assez de stimulants simples qui ne tuent pas, et nous donnent à méditer et percevoir les profondeurs des phénomènes, ou de ce que nous sommes en nous-mêmes. Ou encore de ce vers quoi nous allons, le meilleur possible ou le pire ?
On ne vit vraiment que dans une certaine intensité. On vit mal une existence dans la fadeur, la désolation, ou en engendrant de la souffrance, la nôtre et celle des autres.

Le mal est anormal. Le mal est inévitable par ailleurs. Jusqu’à ce que nous en prenions la mesure. Et puissions savoir d’où nous venons, ce que nous fûmes et que nous avons perdu. Et dont nous sommes nostalgiques, d’un royaume doux et bon, tendre et lumineux, et où n’existent pas cette mort, ces angoisses et ces troubles.
Où il y a du génie sans malédiction.

Bon, c’est entendu, la terre est anormale, planète vivante au milieu d’autres planètes sans vie apparente, comme une oasis dans un désert nous retient, ou une île cernée d’océans impossibles à traverser sans se noyer.
Notre but n’étant pas de mourir, que je sache. Ni de nous nourrir de la vie de nos congénères, de transgresser tous les tabous ou les frontières, en croyant que cela va nous sortir de là.
Et les pouvoirs et leurs abus manifestes sur les dépossédés, croyez-vous qu’ils puissent être facteurs de notre retour vers ces origines de nous-mêmes ? Ou au contraire, un mur et un empêchement à ces retrouvailles ?

Fragilité de la pensée qui nous traverse. Rien de solide. Une frôlement d’aile à saisir au vol. Une intuition. Comme une étoile filante. Une étincelle qui chute sur le sol.

La ruse

Tout vient de « Dieu » : La fusion solaire nucléaire dévoyée de son sens initial, de son utilisation, de sa nécessité – si la vie est nécessaire- , est également capable de produire notre extinction. Ce feu nous laisse cette illusion de puissance alors que son utilisation signe la fin de tout et de toute puissance, nul ne pouvant plus rien. L’anéantissement de la vie sur terre n’est pas relatif. S’il y a de la vie sur terre, c’est pourquoi ?
Briser cette chaîne, c’est rompre pour beaucoup le futur. Pratiquement tout un monde. Il n’y a pas de destin individuel s’il n’est pas relié au destin collectif, et pas de destin collectif s’il n’est pas relié à un destin individuel « informé ». Tout s’enchaîne.
Mais dans l’absolu, dans les cartons et desseins d’ordre divin, il n’est pas de volonté destructrice gratuite ou inutile, aveugle ou inconsciente, ignorante de ce qu’elle fait, mais exclusivement une volonté de voir la vie poursuivre la vie, vivante et non mourante.
Il n’y a pas de volonté de faire souffrir ou prendre les êtres en otage et de persécuter. S’il y a des maux et du terrible, ce n’est pas pour rien. Il n’y a pas d’issue dans le néant. On ne l’atteint pas. Ceux qui croient ou pensent ou imaginent qu’ils vont voir cesser les maux, dans cet absolu non-être, et se laver de tout ce qu’ils ont commis ici dans les corps liés aux âmes, en ayant brisé sciemment et méchamment la vie, s’autorisant dans cette continuité sans broncher, ne doivent pas se douter de ce qui les attend, se croyant à l’abri.
Mais ça ne passera pas.
Toutes les ruses des hommes sont déjouées.
Toutes les faussetés qui ruinent les existences mises en lumière.