Devoir

On doit mourir. C’est un acte. On se sépare de ce corps minuscule. On se trouve sans corps. Absolument nu. Dans ces univers glacés, brûlants et tourbillonnants, qui nous enivrent et nous disloquent nous laissant cette impression de chute sans fin, de telle sorte que nous perdons non seulement le corps, mais aussi conscience, que nous abandonnons la partie, nous nous abandonnons complètement. Nous faisons corps avec les univers inconscients, sans volonté. Nous laissant sans possibilité d’agir.
Nous reste-t-il encore un œil, une perception, une ultime sensibilité de pouvoir contempler les mondes vivants, les habitants, et d’entendre leurs voix ? Sans cela, nous serions morts complètement, fusionnés à la totalité, sans existence propre, livrés à l’absolu des mouvements des objets sans conscience, avec lesquels nous n’aurions nulle distance, faisant corps avec toutes choses comme des pierres muettes, indifférentes.
Est-ce ainsi ou autrement ?
S’il nous reste un œil vivant, et donc une présence vivante en arrière plan, dont les contours restent flous, nous nous voyons dans ce miroir d’univers polymorphe. Nous pouvons mesurer l’étendue de ce que nous fûmes, et de ce que nous fîmes. Nous voyons défiler nos passés, et nos spectres, nos souffrances et nos joies, inscrites à jamais sur les parchemins et les pierres, les ondes, les musiques et les images. Réalisant à quel point ces univers sont vivants vibrant de tous leurs membres.
Cela nous ouvre le désir de vivre. Ou de revivre, de nous rattacher aux êtres vivants qui nous font vivre. Même si à l’analyse des temps présents nous savons de quelle mort, de quel plomb est faite l’existence des mondes. Il s’agira de transmutation, ou de transfiguration.
Se pourrait-il qu’en fin de tous les parcours, nous n’ayons plus besoin de renaître dans nul corps particulier, en nul endroit spécial, cela signifierait que nous sommes accomplis. Unis en conscience avec les univers. Unis dans l’Amour.
Mais donc, revenant sur cette terre, nous constatons autre chose. Comme une volonté d’en finir, et de mourir. Assez universelle. Comme si nous avions épuisé toutes les possibilités ? Et que nous voulions passer de l’autre côté pour voir et vivre autre chose. Une autre aventure vers l’inconnu.
Bon, ceci, nous pouvons, parce qu’en nous il y a de l’immortel et que s’impose l’inconnu à découvrir. C’est chaud, c’est périlleux, éprouvant. Cela nous propulse en avant.
Comme on dit faites vos jeux, rien ne va plus.

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