Le je et le nous

Le « je » ne tient pas sans nous ; le « nous » ne tient pas sans un je conscient de l’enjeu. Il faut cette particularité du je conscient pour édifier un nous conscient et vivant. Même si le je éphémère est porteur de ses illusions existentielles, il progresse en lui-même, il chemine et se forme, à la fois dans ses chaînes et dans sa liberté, et ses fautes, en fonction de sa bonne volonté et uniquement sous sa conduite. Bref, (ce) je m’assume. Aussi grâce aux autres. Aussi bien par les maux que par les biens. Pensant tout de même que la souffrance n’est pas appelée, ni pour moi, ni pour personne.
Cette souffrance, comme des poisons et des venins dans nos chairs, il n’en faut plus. Nous avons eu notre dose, comprenez. Nous ressentons celles des hommes et des êtres vivants, cela se transmet, comme des vibrations et des secousses sismiques. De même que la joie et le bonheur sont communicatifs, mais non pas de la com, de la propagande. Là, c’est toujours chargé de toxiques, et cela nous rend stupides, et fixés dans l’impasse.
Il est possible que ceci se soit passé ainsi : un jour est apparue cette conscience d’un je en un je quelconque, se sentant à raison autre que tous les autres, détaché du corps commun. Avec tous les dangers qui purent en découler. Mais aussi toutes les possibilités de construction pour le motif de la cohérence intime ou interne d’un je enclos en lui-même. Cohérence, n’est peut-être pas le mot, disons ce sentiment d’être unique. Non pas supérieur, ni inférieur, mais où je n’ai de compte à rendre qu’à moi-même, sans devoir obéir à une conscience ou un esprit que je récuse ou qui ne m’éclaire pas. Tout cela pour se rendre vers les lieux inconnus, sans y entraîner les autres ni se faire perdre. On a un droit fondamental, c’est de voir la lumière, et de ne pas subir les souffrances indues.
Je repense à ce qui est peut-être à l’origine de ma détermination au cours de mon enfance heureuse. Ce fut un jour cette dame agonisante comme morte sur la chaussée, d’où sortait du sang de sa bouche. À cela on ne peut opposer qu’un non définitif.

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