De la fatigue à se battre contre des fantômes

Que valent ces univers s’il n’y a personne, s’ils sont régis par des lois inflexibles ou inexorables conduisant à une sorte de mouvement d’expansion, de production, puis d’extinction ? S’ils ne servent qu’eux, ils ne servent à rien, les univers sont absolument inutiles. Autant dire notre insignifiance au milieu d’une immensité insensée. Malgré tout l’amour que nous pourrions avoir, ce serait un songe vain, des souffrances inutiles. Nous aurions vu le jour pour rien, puisque rien ni personne ne demeurerait nulle part. Le bal des astres tournerait comme une mécanique folle, de même que ces tourbillons de poussières dans un désert sans fin. Que ceci ou cela se soit passé, cela resterait indifférent.

Mais ce n’est pas ainsi, malgré le vide abyssal des univers. Nous ne sommes pas seulement les observateurs distants de ces agitations ordonnées et désordonnées, nous sommes aussi co-producteurs des scénarios.

Qu’en savons-nous ? C’est facile d’affirmer sans preuve. Ou sur la base de témoignages venant d’un autre, venu d’on ne sait où, nous racontant avoir vu le loup.

Il est des esprits pourtant éclairés qui ne voient que cette absence, ou cette présence, sadique universel, ce qui nous plonge dans un pessimisme affreux. Au regard des résultats de notre mort certaine. Tout étant disparu.

Par nostalgie nous recherchons les traces d’existence dans le passé, espérant s’y trouver encore. Mais cela ne marche pas. De même dans les étoiles dont nous ne percevons que les lumières du passé immensément lointain, aussi éloigné en distance qu’en durée. L’univers serait un vase clos inhabité. Et paradoxal, puisque nous y sommes. Puisque nous le pensons, il doit être pensé. Habité de pensées. Et pas que.

Bon, c’est assez dingue, cette affaire. Les êtres microscopiques que nous aurions été en sont arrivés à questionner les galaxies. En grimpant les multitudes de barreaux de l’échelle, et des métamorphoses de corps en corps. Forcément ça fait assez mal ces séries d’accouchements de notre être pensant, aimant, conscient, vers quelque chose de plus, de toujours plus. Avec en prime une conservation de la mémoire.

Comme si nous ne pouvions nous stopper et nous satisfaire une fois pour toute de notre condition limitée. Il apparaît qu’il n’y a pas d’arrêt possible, ni de havre de paix, sauf ceux que nous espérons.
Ce n’est pas ce que je crois, ou constate ici même. Dans la simplicité des moments heureux, à l’écoute des belles musiques, des chants poétiques, et des œuvres sublimes. Du bonheur également avec enfants et petits enfants, des amis, de ce qui est encore vivant dans le monde.

D’autres parmi nous affirment qu’il n’y a de vérité d’être que dans le présent, ce qui me semble insuffisant, du fait du futur qui se présente, et qui nous oblige à nous pencher vers lui. Ou sortir la tête du bocal présent.

Mais de façon catégorique, nous pouvons refuser le futur démentiel que certains voudraient nous construire, comme prison terrible. Et ce qui est déjà en place. Comme un mur infranchissable. Ou que nous allons devoir payer de notre vie si nous voulons le dépasser.

Qui sont les promoteurs de ces geôles et grillages barbelés virtuels et réels. Et au service de qui agissent-ils ? Protègent-ils les dieux de notre intrusion dans ces paradis, qu’ils sont censés connaître et servir dans leur adoration du Pur ?

Alors pourquoi les pauvres hères que nous sommes n’ont-ils pas été illuminés depuis l’enfance par ces rayons solaires facteurs des harmonies. Et que ce sont des domaines réservés et privés, des domaines interdits. Exactement comme est l’Univers invisible, ou comme sont les Présences invisibles.

Si je vous dis qu’ils nous voient, vous pourriez vous demander de quel Loup il s’agit.

Loup, masque, personne ? Allo ?

Il y a un tableau où l’on voit le Christ seul sur la croix, paysage désolé, jaune et gris , légère brume. Personne autour de lui.

Nous ne savons rien sauf ce qui nous vient de lui.( ou d’elle à tire d’aile ) 🙂

Pourquoi donc la grande masse des hommes est-elle privée de vérité ou de pouvoir vivre ? Comme devant se rendre à l’évidence dramatique de la mort ? Ou se plier à l’obéissance dictée par des gens se disant, se posant comme détenteurs exclusifs des clefs des destins ? Comme des propriétaires de la terre, exigent des humbles une soumission totale, peu payée en retour. Et comme nous pouvons en faire le constat effrayant des esclavages et des massacres au cours des siècles. Des sacrifices imposés comme s’il s’agissait de la volonté divine. Et une promesse de résurrection en fin de parcours, calquée sur celle de leur Dieu mort sur la croix.

Non, nous ne sommes pas tenus de mourir, que meure en nous mêmes cette présence d’esprit, ou cette mémoire d’être, se souvenir d’où nous allons. Comme nous agissons en conscience.
Mais ceci est épuisant.

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