Plus rien de normal

Il n’y a plus rien de normal dans tout ce qui se passe sous nos yeux, c’est dramatique. Comme si nous étions littéralement abandonnés ou livrés à notre sort malheureux. Un monde ayant perdu la raison, perdu la vérité et le moindre bon sens, aveuglé par ses passions sinistres. Malgré les vœux d’amour, les rejets réciproques étant plus forts, malgré ces manifestations appelant à la fin des hostilités, tout se passe dans le noir profond des inerties et des ignorances, des intérêts divergents sources de tous ces chaos. Nul humain n’y entend plus rien. Aucun domaine d’activité n’échappe à ces désastres, d’une terre qu’on empoisonne, des vies qu’on assassine ou fait souffrir, aussi bien ces vies humaines que celles de la nature écrasée sous le poids des bombes et des conditions affreuses infligées brutalement. S’il reste quelques lieux où nous pouvons encore vivre et être heureux, ce n’est pas majoritaire. On dirait un envoûtement dans lequel est plongée la masse immense des gens, étant la proie de menaces de guerres, de pauvretés, de prisons, de surveillances, de révoltes et de destructions, que ce soit lors de faits divers immondes particuliers ou de guerres collectives. Bref, la terre est comme un grand corps malade.
Pourtant, au cours des siècles, n’ont jamais manquées les voix sages indiquant les chemins qu’il nous fallait emprunter. Les voix des inspirés devant raisonnablement nous guider, pour que nous nous maintenions en vie et découvrions les secrets du vivant, sans outrepasser les limites, sans être retenus dans des filets d’un puritanisme étriqué, et mortel. Plus rien de normal dans les dictatures des lois humaines absurdes comme des administrations sourdes, des machines de guerre contre nature.
Dans ces conditions inédites, jamais vues au cours des millénaires, et pour cause, puisqu’elles se sont affinées au cours des temps, comme un piège de plus en plus élaboré, et un mensonge faisant office de vérité. Des mensonges plutôt. Des trahisons de l’Esprit. Des profanations de la Parole.
Parler de blasphème. De péché contre l’Esprit. Ce n’est pas une petite affaire. Primo, nous ne pouvons l’écrire ni le dire. Si nous pouvions ce ne serait plus de l’esprit libre, mais de l’esprit enfermé dans la lettre, de l’esprit mort ou pétrifié. Ceci a des effets de rejets de l’autre auquel on dénie son lien avec l’esprit, dès lors que les mots sont différents, ont un sens différent, ce qui est normal. Nous n’avons pas absolument les mêmes histoires, les mêmes origines et conditionnements, nous ne sommes pas égaux dans nos mémoires et nos capacités à supporter ou souffrir. De cela il y a divergences dans les sens et les visions respectives, difficulté à s’entendre, à trouver des accords dans la partition.
Ceci fait un monde anormalement fou et sourd. Les issues peuvent se trouver cependant dans la pluralité des voix, comme celles des musiques et des arts, qui parlent des langues communes.
On ne sait jamais de façon catégorique ce qui est bien et ce qui est mal. On ne sait pas de quelle souffrance l’autre cherche à se défaire. Ce qui peut de façon incongrue générer de la souffrance. Comme si nous défendions nos morts respectifs, et au nom de cela faisions mal à notre tour, au nom de « notre bien ».

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