Dur à dire

La bêtise règne dans ce monde malgré toute l’intelligence. On aura beau nous expliquer, dénouer pour nous les nœuds, formuler et surtout désigner des figures, par des paraboles ou des métaphores afin d’éclairer quelque peu le sens, que nous puissions nous reconstituer, ne pas nous égarer, non rien n’y fait.
Chacun reste enfermé dans ses mots, sans bouger d’un iota. Il faut reconnaître que modifier sa conscience est difficile. Imprégné de concepts définis, inculqués tout au long de son existence, on ne sait penser autrement, on sort difficilement de ses habitudes qui font sens pour nous, et sont insensées ailleurs.
Désigner Satan ou Lucifer n’est pas pour rien, Satan ou Jésus non plus. Il s’agit de ne pas les confondre, ou penser qu’ils ne véhiculent rien de spécial en notre esprit, qu’ils seraient que jeu gratuits. Pareil si nous confondons le haut et le bas, la droite et la gauche, nous nous mélangeons dans nos méninges, dans nos discours, ce qui montre à quel point nous sommes égarés, et que nous nous raccrochons à des épaves.
Dur à dire tout cela. D’autant plus que le dire ne modifie rien, sans la pensée présente, sans vision claire du signifié, qui se transmet subrepticement. Il faut des mots mais lesquels ? Le silence n’est pas éternel. Ce n’est pas la fonction du Verbe de ne rien dire.
Nous voudrions pouvoir dire simplement les choses évidentes, pouvoir nous y rendre, et simplement nous retrouver vivants par ces mots, dans ces pensées contenues. Pour cela il faut ce noir et ce blanc, ces jeux de contrastes et d’opposés, de chaud et de froid, de lourd et de léger. C’est un assemblage d’éléments séparés, objectivement distincts, affreux si nous les mélangeons ou si nous en inversons le signe. Le plus ou le moins.
Jusqu’à quel point se trouvera-t-il que toute dualité s’efface ? Et comment allons-nous pouvoir nous y rendre sans cette dualité qui semble absolument nécessaire. Ce n’est pas en balayant d’un revers de main la nuit qu’il fait jour.
Il y a des silences qui ne disent rien, des silences pesants qui nous emmurent et nous enferment dans notre isolement, sans miroir. Qui expriment une nette séparation entre les êtres.
Il aura sans doute fallu être séparé pour que nous opérions en nous-mêmes, et selon nos seules ressources fondées sur quelque leçon, ce retour vers notre être un, vivant.
Comment pourrions-nous être autre que ce qui est nous, par conséquent être à nous ? Ce qui revient à rejeter ce qui nous altère, ce qui nous entrave sur le chemin.
Le chemin, qui donc le sait ?

Sat

Si le temps n’existe pas, l’éternité non plus. Perdre son temps c’est aussi perdre son éternité. Le temps est une ouverture possible vers les dimensions supérieures ou inférieures, qui composent l’univers, que l’universel traverse de part en part. Ceci est vague, ceci est flou. Ça ne nous dit rien de ce que nous avons à faire ici, ce qui doit être simple. Il ne s’agit pas de simplifier ni de réduire les éléments divers de l’infini ou du fini.
Il s’agit de pain. Donc de farines, de grain à moudre, de cultures, d’échanges, de nourritures pour le corps, pour le cœur et pour l’esprit. Ce qui a pour effet que nous nous sentons reliés ou non à quelque chose de vivant. Séparés nous ressentons cette mort en nous, comme si nous étions morts, incapables de rejoindre ce qui est vivant, qu’on voit s’éloigner impuissants. L’éloignement n’est pas spatial. Il est humain en notre esprit, de ce que nous faisons de l’esprit. Cette dimension d’ange qu’il faut comprendre. Par opposition à cette dimension de bête, dont le mot ne colle pas du tout aux animaux. Bête c’est autre chose, ce serait un qualificatif d’actes stupides qui (nous) font mal.
Il y a tellement de gens qui sont abîmés, tombés dans les pièges tendus, présentés comme étant un bien pour eux.
Il ne s’agit pas seulement des technologies, de ces objets encombrants, ou des systèmes, qui sont relatifs et ne nous rendent pas nécessairement esclaves ou abrutis. Il s’agit d’autre chose, relevant de la parole, et de la pensée ( au sens d’onde). Ce qui met en relation le temps et l’éternité.
Il m’est apparu que l’éternité n’est pas un déroulement des temps, qu’il relève d’une autre nature, substance ou essence, que celle du vécu ordinaire. Mais peut aussi nous faire mal si nous le ou la prenons mal. L’éternité est autant féminine que masculine.
Si nous séparons les deux, nous perdons notre éternité, l’éternel en nous.
Ceci dit, une fois que cette réconciliation a lieu, les jours s’annoncent heureux.

Entre parenthèses, une fois de plus, sans trop de rapport avec ce qui précède. N’oubliez pas que Satan est magistral. Et que les hommes mauvais ne firent que salir son message, par jalousie, frustration, ressentiment, impuissance, et volonté de s’approprier du bien sans le rendre. Personnage biblique (Genèse), son rôle n’est pas de nous faire chuter. Ce n’est pas en l’écrasant sous la botte que nous en saisirons ses lumières. Il s’est glissé sous de nombreux maîtres, sur cette terre en apparence abandonnée.

( le fond noir pour ne pas trop endommager les yeux )

Le philtre

On ne peut échapper à son avenir. Il faudra s’y rendre et ne pas sombrer dans la folie, tomber à cause des déséquilibres du mouvement, qui font que tout est vivant. Nous avons en premier lieu le devoir de reprendre en nous cette vie, et ne pas nous laisser submerger par ce qui nous ronge ou nous mine. C’est en vertu de cela qu’il faut savoir, non ce que la science officielle ou savante nous dicte de penser ou de croire, en fonction de ses représentations relatives à un moment de la raison, de la logique, de ces constructions mathématiques, aussi exactes soient-elles dans l’ordre de leur édification, pour le motif simple que – sauf preuve du contraire – le réel absolu de notre âme ou de notre psychisme ne tient pas dans ces formules. Et qu’il y a autant de réels qu’il y a d’êtres pensants. C’est bien l’assemblage qui fonde le réel.
Concernant spécialement notre humanité, on sait qu’il s’agit d’une profondeur abyssale dans toutes nos entreprises, nos champs expérimentaux, visibles par nos arts, reflet de tout le potentiel inclus en nous. Ceci peut nous faire tourner la tête tellement le domaine des productions artistiques est vaste. Nombre de génies en ont perdu la raison, et le sens de l’existence.
La question au demeurant tient à peu de choses. Nous savons qu’il y a cet au-delà et que nous voulons nous y rendre, parce qu’il est consubstantiel à ce que nous sommes ici, périssable ici. Et qu’il donne raison à ce que nous sommes, malgré cette solitude, et l’incompréhension générale des autres hommes, entre eux et avec le monde.

Tout est incompréhensible sauf quand nous abordons la rive heureuse de l’amour.
Ce Qui reste un mystère. Comme la présence de l’eau sur terre.
Est-elle le miroir ? Nous nous penchons pour voir. Nous nous y plongeons pour savoir en ses profondeurs, et là se révèle en quelque sorte ce futur qui nous appartient. Comme une fonction de cette éternité en soi.
Les poètes inspirés ont-ils chanté autre chose que ce philtre d’amour qui les envoûte, sa beauté. Âme divine.

Entre parenthèses, sans rapport avec ce qui précède : les monarchies, comme tous les règnes de ce monde, excessivement plongés dans les eaux noires ou glauques comme des égouts, obligent les autres hommes à édifier des monuments imputrescibles qui les enferment. Pourquoi ces tombeaux ? Il y a une ironie ou une méchanceté des dieux et des empires.

Solitude

Se sentir seul est une chose, vivre seul est autre chose. Cette dernière est mortelle dans le sens où ce qu’on fait, ce qu’on dit ou crée, n’est pour rien ou pour personne, qu’il n’y a personne pour recevoir ce que nous sommes. Ce qui fait que nous ne sommes plus rien dans ce que nous sommes. C’est l’existence abandonnée. Évidemment le malheur nous guette à ce moment là. Celui qui sait peut encore trouver dans les instances les plus hautes sa consolation, et son salut, à condition de savoir où les trouver, comment s’y recueillir, et s’y fondre.

Je me demande s’il existe quelqu’un pouvant agir absolument pour lui-même, stricto sensu, dans une espèce d’égoïsme forcené. Et s’il existe ce genre d’être, il doit être très déchu. Comme implosé en lui, sous la pression d’un amour insupportable. Faut-il voir que l’amour est une force qui pèse sur notre âme de toutes ses forces pour que nous trouvions en nous cette force d’aimer, et de diffuser cet amour. Et ce que cet amour contient, comme violence retenue. Ceci peut vous sembler limite. C’est pourtant comme le feu solaire.

Cela donne tout le sens, à toute chose et à tout acte. Même le pire.

Comment discerner ? Les hommes font des guerres par amour, ce qui a première vue semble uniquement rempli de haine. Alors qu’ils se battent pour l’amour de ceux de leur camp, ou de leurs clans, tribus, familles, patries, pour leurs mémoires. Même si c’est atroce. Et même si cela ne rachète rien. C’est comme si un sursis était accordé, ou qu’ils puissent trouver encore un espoir. Celui qui n’a plus aucun ressort pour lutter, qui n’a plus que la misère existentielle face à lui, livré à la déchéance, est comme fantôme errant dans ces univers devenus vides à ses yeux.

Bon, tout cela ne résout rien, dans ces violences exprimées dans ces folies collectives et ces vengeances, ou dans les discours sans lumière. Aimer ses ennemis, cela n’est pas pour rien. Cela indique le sens de l’amour vivant. Au contraire de l’amour qui tue.

Face à cela chaque homme est seul. Et opère son choix. Encore faut-il qu’il puisse exprimer cet amour. Et que l’amour ne devienne pas la haine de l’autre.

Quand l’autre est mort on se trouve seul anéanti.

Celui ne tue pas, qui ne comment aucun mal excessif dans le monde et dans l’esprit, qui aime dans son cœur, quel ennemi peut-il avoir ?

Il me semble que face à lui reste le néant.

Mais tout ceci est très faible dans les mots. Cela devient vrai et effectif dès lors que c’est vécu, incarné. Cela se diffuse en vérité.

Le pire

C’est un spectacle désolant, et sans joie. Des hommes se tuent, se haïssent, font n’importe quoi. La rupture est consommée entre ceux qui se disent chrétiens, défenseurs des valeurs de l’occident, qui ont étés conditionnés dans ce sens là, obéissant à leurs pères et leurs mères, soutenant cette orthodoxie catholique, et sont arrivés à ces convictions parce que l’appareil les a convaincu qu’ils se tiennent dans la vérité, et ceux des camps opposés procédant de la même façon, qu’ils soient athées ou d’une autre religion. Ce qu’il y a de commun entre eux est cette haine, plus ou moins prononcée. C’est quelque chose de profondément toxique, chargé de toutes les férocités possibles, de vengeances atroces, de bain de sang en perspectives, et de souffrances. Il n’est plus question de joutes verbales qui nous donnent à penser, et envisager une construction sociale sur de la diversité. Il s’agit d’éliminer l’autre, aussi bien dans son passé que son futur, comme si tout était consommé et qu’il n’y avait plus rien à faire. L’autre est ennemi radical.
Tout cela au nom d’un jésus, d’un prophète ou d’un messie, d’un système de lois ou d’ un ensemble de morales paraissant incompatibles. Chaque nation ( ce mot qui fait horreur), chaque race ( mot encore plus horrible ) se retrouve enfermée dans sa généalogie, dans ses langues, ses représentations et cultures séparées, avec du dialogue impossible.
L’autre, aux yeux des uns et des autres n’a plus rien d’humain. C’est comme si le monde s’excommuniait réciproquement. Partant de ce constat négatif, la communication est forcément impossible, par ces hostilités à la base. Il n’en sort rien que des malheurs, par ces malédictions et anathèmes, même s’il ne sont pas exprimés de façon directe, parce que ce sont des jugements définitifs.
Nul n’est obligé d’adhérer à des opinions ou des croyances contraires aux siennes, nul non plus n’a à vouloir convertir l’autre à ses vues. Parce que ce serait bien présomptueux de vouloir dicter aux autres ce dont on est peu assuré et qui ne repose sur rien verbalement.
Le sens des mots est relatif. Parfois, il tourne à gauche, parfois à droite, et ne dit rien, s’il n’est pas incarné. On ne peut savoir qu’en fonction de ses fruits.
Les assemblées diverses sont chacune porteuses de leurs fruits. Ils peuvent être bons à l’intérieur de leurs ensembles et poisons pour les autres. Rien ne va plus quand cela déborde de l’un sur l’autre, avec des intentions troubles et des méconnaissances.
Je ne me leurre pas non plus sur l’ignoble déséquilibre qui affecte tout, et suscite révoltes, violences de même que tous ces crimes.
Si on y pense, c’est toute notre humanité qui est en question. Avec des effets assez terribles sur ces humanités hors de la terre.
Certains purent dire à juste titre que ce sont nos morts qui perturbent le cours normalement paisible de la vie des vivants. Comme si nous n’avions pas sur digérer nos morts, ceux qui sont précisément hors de la terre.
Il s’agit donc ici des questions liées à notre résurrection, de même à notre destin outre tombe. Parce que rien n’est joué. Dans un sens ou dans un autre.
Rien ne joue dans la mort. Voilà le pire.

Il se passe ceci

Nous sommes arrivés au bout. Soit l’effondrement, soit le soulèvement. Effondrement dans cet épuisement de l’énergie et du sens, conduisant au chaos et à la paralysie du vivant. Soulèvement de la terre pour contrer cela. Ce qui emprunte deux formes de destruction. Deux révolutions. Qui s’opposent.
Nous ne trouverons pas de solution pour résoudre les chocs qui se produisent en observant les événements passés, ou dans les prédictions des machines intelligentes. Les plans malins des hommes déjouent les analyses rationnelles. Parce qu’ils ont leurs sources dans l’irrationnel. La foi, le fanatisme, la possession, les sentiments sourds, les vengeances, les haines, les désirs ou les rejets, viscéralement inscrits dans les corps et les mémoires, ce qui fonde les assemblées par la face noire, dans la nuit noire où des hommes et des femmes se retrouvent des lumières communes. Ce qui les soutient et les anime à faire leur guerre, au nom de la paix éternelle, au prix du sacrifice de l’autre.
Le monde dans son ensemble se calque sur ces plans et sur les mots qui en dessinent les contours. Chacun se sentant assuré de l’universel. De même que l’autre toujours taxé d’hérétique, de païen ou de mécréant, peut être réduit en esclavage dans ces conditions.
Arrivés au bout de notre humanité, sur cette terre enfermée sur elle-même dans ses histoires respectives, comme dans ses perspectives, comment allons-nous passer sur l’autre rive des temps nouveaux, échapper à la ruine promise, d’un côté par l’effondrement et de l’autre par le soulèvement ?
Même ici cela demande de discerner de quel effondrement et quel soulèvement il s’agit. Ce qui est sinistre doit tomber, ce qui est éteint doit se relever.
La guerre n’est pas finie. Voyez tous ces camps de réfugiés, ces migrants, ces exclus dans un monde faisant mine de promouvoir l’inclusion, la nature pillée, les corps rendus malades par les laboratoires. J’entends ici tous les corps, insectes, mammifères, poissons, cétacés, et nous par conséquent. Voyez aussi les égorgements.
Tout est faux, même par ceux qui disent vrai. Tout devient vrai dans le silence et le recueillement des vérités. Ceci doit avoir des effets sur notre existence présente, nous délivrer des misères, nées de nos révoltes inappropriées, de nos égarements mélangés de bon sens, et de ruses.
Ne serions-nous que le jouet d’un démiurge ? De pauvres diables prisonniers d’un Démon ?